Depuis 1090, la procession sillonne immuablement les rues de la cité. L’évêque de Noyon, Radbod, l’institua dans l’espoir de faire cesser le fléau qui frappait les habitants. L’empoisonnement produit par l’ergot de seigle prit fin et en guise de remerciement, la procession se perpétua, sauf en 1566 (la ville étant aux mains des iconoclastes)… et en 2020, année de pandémie au coronavirus !
Mais la veillée de prière du vendredi, elle, a pu être maintenue, dans le respect des mesures sanitaires décrétées par les autorités. Toutes les places autorisées étaient occupées. Aux abords de l’autel, la châsse de Notre-Dame, joyau de la Cathédrale réalisé au 13e siècle par l’un des plus grands artistes de son temps, Nicolas de Verdun. Cette châsse sert d’écrin aux reliques de la cathédrale dédiée à Notre-Dame. La statue Notre-Dame des malades avait également été installée devant l’assemblée.
« Nous vivons cette crise avec difficulté », a reconnu l’abbé Michel Hubaut, président du chapitre. « Nous pensons à la pandémie, nous pensons au réchauffement climatique. Nous pensons aussi aux conséquences économiques, sociales et politiques qui risquent de s’accumuler. Chacun et chacune tente de se frayer un chemin, nous cherchons des lieux de rencontre et d’échange qui permettent de susciter l’amitié et la solidarité. Ce soir, plus particulièrement, c’est un moment de rencontre, de prière et de méditation, propice à l’écoute d’une Parole qui nous transforme et nous appelle à la conversion des cœurs. »
Après avoir longuement décrit l’homme abandonné évoqué par Isaïe et auquel nous pouvons nous identifier, « celui qu’on ne voit pas, qui n’a pas d’argent, à qui on ne répond pas parce qu’on n’a pas le temps, celui qui se tait ou n’a pas les moyens de parler », le président Hubaut a rappelé que nous sommes appelés au vrai bonheur promis dans les Béatitudes. En nous incitant à ne pas en être seulement bénéficiaires mais aussi dispensateurs…
Les malades et leur famille, plus spécialement ceux touchés par l’actuelle pandémie, mais aussi le personnel soignant ont trouvé une large place dans les intentions qui ont suivi.
C’est alors un autre moment impressionnant et qui remplit la cathédrale d’une émotion palpable. Pas moins de huit chanoines titulaires, nommés par Mgr Guy Harpigny, ont officiellement rejoint le chapitre. Après avoir entonné en chœur le « Veni creator », Etienne Deregnaucourt, Olivier Fröhlich, Xavier Huvenne, André Parent, Philippe Pêtre, Yves Verfaillie, Michel Vermeulen et Patrick Willocq ont répété ensemble les formules de serment lues par le président Michel Hubaut devant une assemblée très attentive.
En temps normal, les nouveaux venus auraient ensuite dû être accueillis par leurs pairs avec une grande accolade fraternelle. Mais rien n’est plus « normal », en temps de pandémie. C’est donc dans le respect des distances et de manière plus spirituelle que cet accueil s’est déroulé. Mais les applaudissements, eux, ont retenti de manière bien réelle dans la Cathédrale multiséculaire !
Agnès Michel